Comment se joue l’avenir de nos rivières et de nos saumons

A l'issue des premiers arrêts du Grenelle initiés par le Président de la République en mai 2007, le document final à inscrit dans les mesures pour enrayer la perte de la biodiversité, l'effacement de quelques barrages – Poutès, Vézins, La Roche qui Boit, représentant 30 MW sur les 25 400 MW hydroélectriques existants. Certains barrages ne devraient donc plus être les icônes intouchables du développement. On a donc admis qu'en enlever certains devient même un nouveau progrès pour réconcilier l'homme et les rivières. Les effacer ou les restaurer oblige à adapter les solutions existantes et à construire en commun des démarches de restauration partagées rencontrant l'accord des différents acteurs; collectivités, services de l'Etat, établissements publics, scientifiques, entreprises, riverains, ONG, pécheurs. Difficile consensus ! La lecture de ce qui se négocie à la chambre des députés à la suite de cette décision est extrêmement instructive et révélatrice de l'évolution des esprits et des mentalités concernant la préservation du patrimoine nautique français et de la biodiversité. On constate qu'il ne suffit pas que le Grenelle ait définitivement légitimé le fait que certains barrages présentent plus d'inconvénients que d'avantages pour que le "Yalta hydroélectrique devant optimiser les ouvrages afin de régénérer le milieu naturel" rentre rapidement dans les faits. En lisant ce texte on peut être pris d'une violente envie de mettre une note sur 10 pour quantifier son opinion sur la qualité des différents intervenants. Le forum du site www.rivieres.info serait une opportunité pour le canoéiste ou le kayakiste qui aime "sa rivière" d'intervenir dans ce débat et aider les sénateurs à prendre de bonnes décisions. Comme le fait justement remarquer Roberto Epple président de SOS Loire vivante la meilleure des salmonicultures est très probablement la rivière sauvage et libre*. La production de "KWh verts" est maintenant à notre portée et effacer quelques barrages inutiles ne signifie pas que certains autres vont continuer à produire sans prendre en compte la nécessité de restaurer les milieux aquatiques.

* L'aquaculture intensive est une industrie polluante en raison des déchets organiques rejetés par les saumons. Elle dégrade l'environnement lorsqu'elle utilise les produits chimiques et les antibiotiques à forte dose pour espérer combattre la mortalité. L'industrie salmonicole chilienne,  qui s'apprêtait à devancer la Norvège, premier producteur mondial avec 620 000 tonnes/an en a fait la triste expérience en voyant dernièrement sa production chuter brutalement de moitié. La production française en 2006 était de 1400 tonnes.

Séance du 3 février 2009
(compte rendu intégral des débats)

M. le président.
L'amendement n° 763 rectifié, présenté par MM. Pointereau, Revet, Bizet, Pierre et Bailly et Mme Procaccia, est ainsi libellé :

Compléter le premier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée 
Cette étude, basée sur des données scientifiques sera menée en concertation avec les acteurs concernés.
La parole est à M. Rémy Pointereau.

 

M. Rémy Pointereau.

Cet amendement vise l’étude qui a été évoquée tout à l’heure et qui concernerait l’aménagement ou l’effacement des obstacles les plus problématiques pour la migration de poissons. Nous souhaitons que cette étude soit menée en concertation avec les acteurs locaux concernés. Il est vrai que les riverains des cours d’eau, qui sont des acteurs de terrain permanents, ont une connaissance incomparable des problèmes rencontrés et de leurs causes, et qu’ils peuvent, grâce à leur expérience, compléter les approches administratives en proposant des solutions pragmatiques. Il s’agit, finalement, d’un amendement de bon sens. Les données scientifiques élaborées dans un bureau, c’est bien, mais la connaissance du terrain, c’est mieux ! On ne doit pas imposer l’élimination des barrages ou des stations hydroélectriques, construits parfois récemment– il y a quinze ans – aux frais soit de personnes privées soit des collectivités locales, sans l’aval des acteurs locaux privés, mais aussi des élus locaux, qui sont présents dans des syndicats de rivières et qui ont réalisé des investissements importants. Je ne me vois pas aujourd’hui supprimer d’un coup de baguette magique, sans concertation, un certain nombre d’obstacles ou de barrages qui ont été construits voilà peu de temps.

M. le président.
Quel est l’avis de la commission ?

 

M. Bruno Sido, rapporteur.

Nous abordons un point important, et je m’efforcerai de donner l’avis de la commission sur les différents amendements le plus clairement possible.

Les amendements identiques nos 218 et 655 vont à l’encontre de ceux sur lesquels la commission a émis un avis de sagesse. La commission n’estime pas opportun de supprimer la possibilité d’aménager les obstacles les plus problématiques pour la migration des poissons. Je demande donc aux auteurs de ces amendements de les retirer ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable. Les trois amendements identiques nos 187 rectifié bis, 465 rectifié bis et 516 rectifié tendent à supprimer l’objectif d’effacement des obstacles les plus problématiques à la migration des poissons. La commission a émis un avis de sagesse sur ces amendements pour les raisons suivantes. En tant que président de la mission commune d’information créée en 2007 sur la sécurité d’approvisionnement électrique de la France, je ne peux tout d’abord que rappeler la position constante du Sénat, qui est de chercher à concilier les exigences environnementales et la nécessité de développer l’énergie hydroélectrique. L’importance de celle-ci est double.

D’une part, elle permet d’accroître la part des énergies renouvelables, puisqu’elle représente pour l’instant plus de 90 % de l’électricité d’origine renouvelable. Elle participe ainsi à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

D’autre part, elle contribue à la sécurité d’approvisionnement de la France, notamment en apportant un appoint décisif pour les pics de consommation. Si, au mois de novembre 2006, nous avons pu redresser la situation malgré les éoliennes, qui ont mis la « pagaille » dans tout le réseau français, c’est grâce à l’apport massif de l’hydroélectricité. Sinon, le réseau se serait complètement effondré.

En tant que rapporteur du projet de loi sur l’eau et les milieux aquatiques, je ne peux que rappeler les nombreuses dispositions que nous avons adoptées voilà tout juste deux ans, afin de garantir la continuité écologique des cours d’eau, notamment en réglementant les débits réservés. Il faut faire respecter la loi ! On nous dit que l’Allier – j’ai bien noté qu’il s’agit de l’ancien Allier – est un cloaque à certains endroits. Or, sauf exception, il ne s’agit pas de ce département ! Il ne devrait donc pas y avoir de problème, puisque c’était l’avis du ministère de l’environnement de l’époque.

Dans le cadre de l’examen du projet de loi sur l’eau et les milieux aquatiques, nous avons également réformé les procédures concernant le classement des cours d’eau. Est-il vraiment opportun et urgent, dans ces conditions, alors que la France s’est fixé des objectifs ambitieux en matière de production d’énergies renouvelables, de prendre une décision de principe sur l’effacement des ouvrages et de l’inscrire dans ce projet de loi de programme ?

D’après les informations qui nous ont été communiquées, cet effacement concernerait non seulement quelques grands barrages jugés problématiques, mais aussi, d’après le recensement effectué par l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques, l’ONEMA, de nombreux petits ouvrages. Or, s’il est assez facile de traiter le problème des grands ouvrages, il n’est pas toujours pertinent de supprimer les petits ouvrages.

Monsieur le ministre d’État, madame la secrétaire d’État, nous vous donnons acte des travaux engagés dans le cadre de la convention sur l’hydroélectricité, qui prévoit un développement de cette énergie. Mais, même dans ce cadre, il semble que la notion d’effacement des ouvrages ne fasse pas consensus et qu’elle suscite l’inquiétude de toute la filière de la petite hydroélectricité, qui voit dans l’inscription de ce principe dans la loi un danger juridique pour toutes les installations, et qui s’interroge sur l’imprécision juridique et scientifique du terme « problématiques ».

D’ailleurs, la petite hydroélectricité n’est pas si petite que cela ! J’évoquerai à cet égard la picohydroélectricité, dont les petites turbines au fil de l’eau produisent tout de même 45 à 50 kilowattheures d’électricité.

M. Roland Courteau.
Comme les petites éoliennes !

 

M. Bruno Sido, rapporteur.

La commission est consciente qu’il s’agit là d’un engagement du Grenelle de l’environnement, et c’est pourquoi elle a émis un avis de sagesse. Elle estime toutefois que ce n’est pas une raison suffisante pour rejeter les présents amendements et qu’on ne peut demander purement et simplement au Parlement de ratifier les accords du Grenelle, faute de quoi on pourrait s’interroger sur l’utilité même de l’examen du texte. J’ajouterai que les questions d’hydroélectricité ne sont pas les seules à se poser. S’il n’y avait pas le barrage de Suresnes, en été, on traverserait la Seine à pied sec au niveau de Notre-Dame ! Des dizaines de milliers de petites retenues en France, qui font parfois un mètre de haut, ont une utilité certaine, ne serait-ce que sanitaire. Le sujet est donc extrêmement compliqué. Par conséquent, je le répète, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat sur ces trois amendements identiques, mais elle attend surtout des explications de la part du Gouvernement.

La commission sollicite le retrait de l’amendement n° 219, dans la mesure où le critère de migration des poissons lui paraît suffisant. Enfin, la précision prévue par l’amendement n° 763 rectifié paraît tout à fait utile. La commission émet donc un avis favorable.

M. le président.
Quel est l’avis du Gouvernement ?

 

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.

Nous élaborons un texte d’ordre général, même si les conséquences peuvent être particulières : il s’agit de redonner vie à nos cours d’eau. Ainsi, l’article 24 concerne les « eaux résiduaires urbaines », et toutes les collectivités se sont mobilisées. J’ajoute, mais ce n’est pas l’objet du texte, qu’un certain nombre de produits ont autrefois été déversés dans nos fleuves et nos rivières. Or chacun sait à quel point il est difficile de récupérer un bon état écologique de ces cours d’eau. On sait aussi qu’un certain nombre d’obstacles, liés à l’histoire, n’ont plus de vocation véritable, mais qu’ils sont toujours là. Ils appartiennent parfois à une personne privée, parfois à une collectivité, à l’État ou aux départements. Il existe sur nos fleuves et nos rivières 50 000 obstacles, dont 48 420 n’ont aucun rapport avec l’hydroélectricité, c’est-à-dire 97 % ou 98 %. À vrai dire, notre seul véritable problème est de mettre en place une mission partenariale d’identification pour savoir si certains de ces obstacles peuvent avoir un intérêt, par exemple en cas de crue, et de trouver des moyens de financement pour rétablir la fluidité de nos cours d’eau, nos fleuves, nos rivières et nos ruisseaux. L’unique objet de ce texte est d’étudier les différents obstacles, et ce sera compliqué. On a demandé à l’ONEMA de commencer à les identifier : certains obstacles présentent des avantages et des inconvénients ; d’autres, et ils sont nombreux, posent des problèmes de pollution élémentaire, ce qui impose leur destruction. S’agissant de l’hydroélectricité, notre pays compte 2 000 barrages hydroélectriques. D’ailleurs, la position constante du Gouvernement, notamment celle du Grenelle de l’environnement, est assez claire : l’hydroélectricité fait partie des énergies renouvelables de notre pays. Du reste, nous avons pris un décret de renouvellement des concessions hydroélectriques françaises en prenant en compte quatre critères : la performance énergétique – plus 12 % – la qualité des turbines, la sécurité – un certain nombre de barrages ont plus de soixante-quinze ans – et le respect des normes environnementales. Cela ne pose pas de problème majeur, puisqu’un consensus s’est dégagé, me semble-t-il. De grâce, écartons l’idée que nous opposons l’hydroélectricité à la récupération de nos fleuves et de nos rivières : il y a peut-être un ou deux cas particuliers où l’obstacle pose un problème pour l’hydroélectricité ou la petite hydroélectricité. De toute façon, ces cas emblématiques sur le territoire national seront traités non pas par ce texte, mais par le renouvellement ou non de la concession, qui est la seule réalité dépendant de l’action de l’État. Et cette décision ne sera prise qu’après concertation avec les élus. D’ailleurs, une réunion aura lieu prochainement avec M. Gouteyron, M. Boyer, et M. Proriol, député. Il s’agit de deux problèmes distincts ! Ne mélangeons donc pas un texte de philosophie générale avec un cas particulier, qui aura son traitement propre !

Je suis même prêt à proposer un amendement à cet article pour indiquer que l’étude concerne tous les ouvrages, à l’exception de ceux concernant les barrages hydroélectriques régulièrement autorisés au titre de l’article L. 214-4 du code de l’environnement. Il faut sortir de cette espèce d’angoisse !

Un ou deux sujets concernant l’énergie hydraulique doivent faire l’objet d’une véritable discussion entre nous. Par ailleurs, une étude est proposée sur l’ensemble des obstacles – près de 50 000* – de nos fleuves et nos rivières. Il faut dédramatiser le débat ! Au mois de septembre, un accord est intervenu entre tous les hydroélectriciens, y compris de la petite hydroélectricité ou de la picohydroélectricité, les fédérations de pêche, amateurs et professionnels, les élus, au travers de l’ANEM et de l’ARF, ainsi que les ONG. Nous soutenons la filière hydroélectrique française : il n’y a aucune ambigüité sur ce point ! Il nous reste une petite décennie pour parvenir à 23 % d’énergies renouvelables. Il n’est donc pas question de toucher à nos capacités énergétiques. En revanche, ce qui est ici demandé à la Haute Assemblée, c’est de poser une pétition de principe pour que soit réalisée une mission d’étude portant sur ces obstacles. Je rappelle que 93 % d’entre eux n’ont pas de rapport avec l’hydroélectricité ! Adresser un signal contraire en refusant de mener l’analyse de ces 50 000 obstacles à la biodiversité serait quelque peu étonnant.

 

* Un nombre probablement sous-estimé

C’est pourquoi, je le répète, je suis prêt à vous proposer un amendement visant à compléter le premier alinéa de cet article par les mots : « à l'exception de ceux concernant les barrages hydroélectriques régulièrement autorisés au titre de l'article L. 214-4 du code de l'environnement ».

 

Cela ne nous empêchera pas de mener notre discussion en toute loyauté et franchise. M. Pointereau le soulignait, il faut tenir compte de la réalité du terrain, qui inclut parfois des aspects liés au patrimoine, à des habitudes… Je suis tout à fait disposé à entendre de tels points de vue, mais les deux sujets sont totalement distincts. Je vous propose donc de les disjoindre et de lancer cette grande étude sur les obstacles, puisque nous n’y échapperons pas. Je rappelle d’ailleurs, pour lever toute ambiguïté, que le mot « effacement » n’est pas synonyme de « destruction » : il s’agit simplement de rétablir la continuité de la circulation de l’eau de manière à préserver la diversité. J’en avais tout à l’heure un exemple sous les yeux, à L’Isle-Adam, où je me trouvais avec le Président de la République : il s’agit d’un barrage concernant une écluse, pour lequel la continuité a été rétablie grâce à la mise en place d’un ascenseur. C’est strictement le cas qui nous intéresse, et le mot « effacement » a même été utilisé ! Si nous dissocions les deux aspects de la question, il sera possible de progresser sur cette étude, qui ne représente tout de même pas un engagement « massif ».J’ai entendu les inquiétudes qui se sont manifestées. Je rappelle que c’est la France qui a inventé ce mode de production d’énergie et que le premier barrage hydroélectrique fut français !


M. Daniel Raoul.
Eh oui !

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.

Les oppositions ne sont donc peut-être pas aussi fortes qu’il y paraît. Il reste que nous avons 50 000 obstacles à la biodiversité !

Afin de dédramatiser la situation, je présente un amendement destiné à lever toute ambiguïté en excluant les barrages hydroélectriques du champ de l’étude.

 

M. le président.

Je suis donc saisi de l’amendement no 817, présenté par le Gouvernement, qui est ainsi libellé :

Compléter le premier alinéa de cet article par les mots :

à l'exception de ceux concernant les barrages hydroélectriques régulièrement autorisés au titre de l'article L. 214-4 du code de l'environnement

Quel est l’avis de la commission ?

 

M. Bruno Sido, rapporteur.

Je partage tout à fait le sentiment de M. le ministre d’État : le problème n’est pas l’hydroélectricité, dont le cas a été réglé de façon satisfaisante dans la loi sur l’eau et les milieux aquatiques. Aujourd’hui, seuls quelques barrages ne sont pas aménagés. Le problème, ce sont les 50 000 obstacles, ou prétendus obstacles, à la migration des poissons. Or, monsieur le ministre d’État, l’expérience que j’ai vécue dans mon canton m’incite à vous mettre en garde : il se trouvera toujours des personnes, disons très zélées, pour, localement, déclencher la révolution en montant, par exemple, les pêcheurs contre les « écolos », alors qu’en réalité tout le monde est d’accord. Vous êtes sur le point d’ouvrir la boîte de Pandore, et personne ne sait ce qui en sortira. Personnellement, je suis bien sûr favorable à ce qu’une étude soit conduite : qui pourrait voter pour l’obscurantisme ? Mais il nous faudra veiller scrupuleusement, lors de la deuxième lecture de ce texte ou de la discussion du Grenelle II, à ce que les choses soient bien « bordées ». Le diable se cachant dans les détails, ce n’est pas l’hydroélectricité qui suscitera des difficultés : ce seront bel et bien les 50 000 petits barrages qui provoqueront autant de petites révolutions en France.


M. Jean Desessard.
On n’a qu’à en faire une grande et bonne !

M. le président.
Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.

À vrai dire, le Gouvernement partage la position initiale de la commission, qui estimait que l’article 26 était parfait en l’état.

Il émet donc un avis défavorable sur tous les amendements, excepté sur l’amendement no 763 rectifié, auquel il est favorable.

M. le président.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 218 et 655.

Mme Marie-Christine Blandin.

L’amendement no 655 tendait à inscrire dans la loi la nécessité de supprimer les obstacles les plus problématiques. Les positions sur cette question sont plus que contrastées puisque trois amendements ont un objet inverse et que, finalement, la sagesse nous invite à en rester à la rédaction de l’article 26. Cette attitude me paraît être effectivement la plus intéressante. Si nous nous en tenons au texte actuel de la loi, le cas échéant amendé par le Gouvernement, seront donc mis à l’étude l’aménagement et l’effacement éventuel des obstacles les plus problématiques. Cela m’amène à repréciser certains points. Premièrement, les obstacles concernés sont de vieux et grands barrages. Je vous invite à vous reporter au rapport du député Christian Kert, établi au nom de l’Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, sur l’amélioration de la sécurité des barrages et ouvrages hydrauliques. La lecture en est particulièrement instructive ! Deuxièmement, nombreux sont ceux qui chantent les louanges des passes à poissons ; or 60 % d’entre elles ne laissent pas passer les poissons ! Nous avons devant nous bien des études à réaliser sur l’aménagement ! Troisièmement, M. Mézard conteste notre amendement au motif que l’expression « les plus problématiques » serait un non-sens juridique. Mais si je devais citer tous les termes du projet de loi qui sont un non-sens juridique, ils représenteraient la moitié du texte !

Prenons l’exemple de l’article 24 ! Sont mentionnés les « besoins essentiels des citoyens » en eau : s’agit-il de l’eau que l’on boit, de l’eau avec laquelle on fait la vaisselle, de celle avec laquelle on se lave, de celle avec laquelle on lave la voiture ?… Ce n’est pas très juridique !

Les « acteurs compétents », qui est-ce ? Le terme est-il juridiquement bien cadré ? Pas du tout ! La « diffusion des connaissances » : qu’est-ce que la diffusion ?

À destination de qui et comment ? Nous pourrions donc nous renvoyer à l’infini ce type d’argument. Mieux vaudrait trouver ensemble une bonne solution.

Enfin, l’article 26, dans sa rédaction actuelle, ne vise qu’à une mise à l’étude. Sur d’autres questions beaucoup plus conflictuelles, par exemple celle des OGM, il a souvent été reproché aux écologistes de vouloir entraver la recherche, qui doit pouvoir être poursuivie librement. Aujourd’hui, je renvoie le compliment : une mise à l’étude n’a jamais fait de mal à personne, et je n’imagine pas que cela commence avec celle des aménagements, voire des effacements ; en outre, comment savoir si elle n’aboutira pas à la conclusion qu’il ne faut rien effacer ?

 

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques.
Nous sommes d’accord sur les aménagements !

Mme Marie-Christine Blandin.
Par souci d’apaisement, je retire mon amendement, mais j’invite tous mes collègues à s’en tenir à la rédaction actuelle de cet alinéa de l’article 26.

M. le président.
L'amendement no 655 est retiré.
Madame Didier, l'amendement no 218 est-il maintenu ?

Mme Évelyne Didier.

Je rejoindrai ma collègue, car le débat a permis d’éclairer divers aspects. Je souhaite auparavant insister sur un point : je ne voudrais pas que l’on imagine, parce que j’ai défendu la circulation des poissons, que je suis contre l’hydroélectricité ! Qu’est-ce que cette façon manichéenne de poser les problèmes ? Je ne suis pas contre l’hydroélectricité, je suis pour la circulation des poissons ! Ce n’est pas tout à fait la même chose ! Il faut trouver des solutions. M. le ministre d’État a précisé que les études se feraient au cas par cas. C’est effectivement ce qui est nécessaire : la généralité n’est pas de mise en la matière. Je souhaiterais qu’en contrepartie les défenseurs de l’hydroélectricité à tout crin, de la grande, de la petite, de la micro et même de la picohydroélectricité, conviennent aussi qu’il pourrait être intéressant de défendre la circulation de l’eau, la biodiversité et, tout simplement, la vie dans les rivières !


M. Jean Desessard.
Bien sûr !

Mme Évelyne Didier.

Pourquoi vouloir absolument opposer les deux ? Peut-être faut-il chercher du côté du lobby de l’hydroélectricité ! Je l’ai vu à l’œuvre lors de la discussion de la loi sur l’eau : il est très organisé ! Est-ce un hasard si l’on retrouve les mêmes mots dans divers amendements ?  Par souci d’apaisement, je retire mon amendement ; pour autant, notre position sur l’hydroélectricité ne doit pas être systématiquement caricaturée. Je voudrais, pour terminer, revenir sur la suppression des obstacles. Soyons précis ! Certaines petites retenues, pour lesquelles le mot « obstacle » est peut-être même excessif, permettent qu’en été, au moment des étiages, il reste de l’eau dans les rivières. Ces obstacles-là, il ne faut pas les effacer !

M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.
Les études servent à ça !

Mme Évelyne Didier.
Exactement ! Il faudra, au contraire, être attentifs à ne pas vouloir subitement tout effacer, parce qu’il pourrait se trouver des ayatollahs dans l’autre camp !
Soyons mesurés, écoutons-nous les uns les autres, mais, par pitié, ne caricaturons pas !

M. le président.

L'amendement n° 218 est retiré. 

La parole est à M. Paul Raoult, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 187 rectifié bis, 465 rectifié bis et 516 rectifié.

 

M. Paul Raoult.

Je voudrais apporter mon témoignage en tant que pilote du COMOP « Trame verte et bleue ». Nous sommes en train de débattre de questions pour lesquelles certaines régions sont déjà passées à la pratique. J’ai entendu des exposés sur les régions Alsace, Nord–Pas-de-Calais et Picardie : les études sur l’éventuel effacement des barrages y ont déjà été réalisées et, dans les deux dernières régions, les conclusions sont déjà mises en œuvre !  C’est en concertation avec les conseils régionaux, avec les départements, avec les communes, que les études ont été menées, à partir de cartographies très précises de l’ensemble des barrages existants, par exemple sur la Cauche, sur l’Authie, ou encore sur les affluents de la Sambre, en particulier les deux Helpe. Ces barrages, généralement d’anciens moulins à eau, remontent parfois au XIXe, au XVIIIe, au XVIIe, voire au XVIe siècle. Aujourd’hui, ils ne sont plus utilisés, mais, parce que souvent leur entretien laisse à désirer, ils constituent des freins à la fluidité de la biodiversité, des obstacles à l’écoulement de l’eau, et, de plus, ils bloquent tous les types de pollution, solides ou autres, en certains endroits précis. Les élus des communes concernées doivent donc intervenir. Or ces ouvrages appartiennent souvent à des propriétaires privés, si bien que, alors même que l’écoulement des eaux relève de l’intérêt général, il est difficile pour la puissance publique d’intervenir. Cessons cette espèce de guerre idéologique ou religieuse sur le sujet ! Il est évident qu’il nous faut tous défendre l’hydroélectricité. Pour autant, la géographie naturelle de la France est extrêmement diverse. Je puis vous assurer que les études auxquelles j’ai eu accès, que ce soit pour la Picardie ou pour le Nord–Pas-de-Calais, démontrent que l’effacement est nécessaire pour certains barrages qui, alors qu’ils ne mesurent pas plus d’un mètre ou deux, parfois trois, constituent des points de blocage. Or les élus ont pour seul interlocuteur un particulier qui n’a pas les moyens suffisants pour régler le problème, mais qui place la puissance publique dans l’impossibilité d’intervenir !


M. Michel Mercier.
Très bien !

M. Paul Raoult.
Je vous en conjure, mes chers collègues, soyons pragmatiques, examinons les situations au cas par cas en nous fondant sur les études qui auront été réalisées par la région, en collaboration avec les départements et les communes. Le texte est-il bien rédigé ? Je l’ignore ! Il est vrai que la formulation proposée suscite certaines craintes ; nous y avons travaillé dans le cadre du COMOP, et nous y travaillons encore. L’enjeu n’a rien à voir avec l’hydroélectricité ! Il faut prendre en compte la réalité géographique de nos rivières, mais pas seulement !

M. le président.
La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.

M. Éric Doligé.

J’ai écouté avec beaucoup d’attention M. Raoult et j’approuve certains de ses propos. Il donne toutefois le sentiment que seule la Picardie travaille sur ce sujet.

J’ai présidé pendant dix ans l’Établissement public d’aménagement de la Loire et de ses affluents dans une période difficile ;…

 

M. Adrien Gouteyron.

Certes !

 

M. Éric Doligé.

J’ai succédé à quelqu’un d’important, Jean Royer. Les constructions et les effacements de barrages, on connaît ! Les choses ont beaucoup évolué depuis, me semble-t-il. Les esprits se sont apaisés, on a su effacer des barrages, notamment celui de Maison Rouge, après une étude qui avait été réalisée avec Alain Juppé, Premier ministre à l’époque. L’association des collectivités locales, départementales ou régionales a permis de créer des établissements publics importants sur la Garonne, sur la Saône, sur le Rhône ou sur la Loire. La France est désormais bien couverte et nous pouvons nous féliciter, les uns et les autres, des résultats obtenus dans la concertation. À l’époque, celle-ci était un peu tendue ; aujourd’hui, elle est apaisée. Le débat d’aujourd’hui me réjouit, car, il y a quinze ans, il se serait déroulé autrement.

 
M. Bruno Sido,
rapporteur.
Il n’est pas encore fini !

M. le président.
La parole est à M. Adrien Gouteyron, pour explication de vote.

M. Adrien Gouteyron.

Je me réjouis, moi aussi, de ce débat. J’ai apprécié les interventions de M. le ministre d’État et de M. le rapporteur. Je demanderai peut-être à M. le ministre d’État d’apporter des précisions s’agissant de la clause qu’il nous propose d’insérer. Mes chers collègues, je ne me reconnais pas dans les propos de certains d’entre vous. Sans esprit systématique, sans caricaturer et sans appartenir au lobby de l’électricité, j’aurais cependant plus de confiance dans les études si, parfois, ceux qui les réclament ne me semblaient pas animés par certains préjugés ; je le dis très clairement et je vais essayer d’en apporter quelques preuves. Permettez-moi de faire référence à un cas particulier. On évoque, pour un certain barrage de mon département, la remontée des saumons. Je rappellerai d’abord que c’est dans ce département qu’a été construit un équipement que tout le monde apprécie : la salmoniculture de Chanteuge ; c’est un établissement unique !

Le département et l’Établissement public de la Loire ont largement contribué à son financement ; les collectivités de base sont intervenues à la mesure de leurs moyens.

Par conséquent, ne croyez pas que nous ne soyons pas attachés à la continuité écologique, à la remontée des saumons. D’autant que, dans le passé, la présence des saumons dans l’Allier a été un argument économique et touristique extrêmement important, et nous aimerions que ce soit encore le cas aujourd'hui. Mais nous ne voulons pas que les décisions se fondent sur des préjugés. Il a été fait allusion au barrage de Poutès ! Mettons-nous une fois pour toutes dans la tête que ce n’est pas ce barrage qui empêche la remontée des saumons. Je dispose de quelques chiffres et j’aimerais profiter de cette occasion pour vous les communiquer.

Au XIXsiècle, c’étaient des milliers de saumons qui remontaient dans la Loire et qui s’engouffraient dans l’estuaire. Ils sont beaucoup moins nombreux aujourd'hui et ils doivent franchir un certain nombre d’obstacles, dont le premier, tout le monde le sait, est le bouchon vaseux de l’estuaire. J’ai lu, voilà quelque temps, quelques pages du SAGE de l’estuaire qui mettent effectivement l’accent sur la nocivité et la turbidité de ce bouchon vaseux ; il constitue un obstacle considérable à la remontée des saumons. Savez-vous combien, parmi ces saumons qui tentent de remonter la Loire, puis l’Allier, parviennent au pied du barrage de Poutès ? Ils sont non pas des milliers, mais seulement quelques dizaines, et ils arrivent en piteux état. Nous sommes prêts, nous aussi, à regarder la réalité en face, mais que l’on ne nous oppose pas des arguments ne s’appuyant sur aucune considération scientifique. Mon département a fait l’expérience de l’arasement du barrage de Saint-Étienne-du-Vigan ; nous ne nous y sommes pas opposés à l’époque, et nous avons peut-être eu tort. Monsieur le ministre d’État, il faudrait être capable de mesurer les conséquences, sur l’écosystème, de l’arasement d’un barrage. Vous n’employez pas le mot « destruction », soit, mais l’arasement du barrage de Saint-Étienne-du-Vigan n’a pas été sans effets sur l’écosystème ; les habitants de la région vous le diront ! L’arasement d’un barrage comme celui de Poutès – que je refuse avec vigueur – aurait des conséquences très importantes sur l’écosystème et je m’étonne que certains, dans cette assemblée, n’y réfléchissent pas. Et je ne parle pas du coût, que l’on ne prend pas suffisamment en compte. Par conséquent, n’invoquons pas de mauvais arguments ! Je le répète, ce n’est pas le barrage de Poutès qui empêche la remontée des saumons ; les chiffres le montrent clairement.

 

M. le président.

La parole est à Mme Évelyne Didier, sur l’article.

M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques.
C’est de la démocratie abusive !
 

Mme Évelyne Didier.
Nous n’avons pas abusé des amendements puisque nous n’en avons déposé que soixante-dix !

L’article 26 nous permet d’aborder la question de l’hydroélectricité.

Le projet de loi ne prévoit pas de bilan écologique de la filière, bilan qui figurait pourtant dans les engagements du Grenelle. Une remise en place se révélerait pourtant nécessaire afin de mettre en cohérence les objectifs affichés pour le développement de l’hydroélectricité, antagonistes parfois avec les objectifs de résultats obligatoires de la directive cadre sur l’eau – atteindre le bon état des eaux en 2015 – et avec ceux de la trame bleue. Je pense ici, notamment, à une mise à l’étude de l’effacement des barrages de Poutès-Monistrol sur le sous-bassin de l’Allier, de Vézins et de la Roche-qui-boit sur le bassin de la Sélune, dont les situations respectives et l’impact sur l’environnement font débat. Il conviendrait, en outre, que l’État étudie les modalités de compensation des pertes de ressources engendrées par l’arasement des ouvrages pour les collectivités territoriales concernées. L’article 26 porte également sur l’association des collectivités territoriales au développement des maîtrises d’ouvrage locales. À l’instar de mon collègue de l’Assemblée nationale Germinal Peiro, je conclurai en rappelant un amendement qui a été adopté lors de la discussion de la loi sur l’eau et les milieux aquatiques : cet amendement interdit aux conseils généraux de moduler l’aide apportée aux communes et aux établissements communaux qui gèrent eux-mêmes leur service de l’eau, en leur accordant, par exemple, un pourcentage supplémentaire de subvention.

Selon diverses études, la facture du consommateur serait de 20 % à 40 % moins élevée avec une gestion en régie qu’avec une gestion confiée à une entreprise. Il est donc important de réfléchir à une autorisation de modulation de l’aide apportée à ces communes.

 

M. le président.
Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les amendements nos 218 et 655 sont identiques. L'amendement n° 218 est présenté par Mme Didier, MM. Danglot et Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 655 est présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après les mots :

en particulier, rédiger comme suit la fin du premier alinéa de cet article :

les obstacles identifiés comme étant les plus problématiques à la migration des poissons seront supprimés.
La parole est à Mme Évelyne Didier, pour présenter l’amendement n° 218.
 

Mme Évelyne Didier. *

Nous souhaitons que le projet de loi de programme relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement et son article 26 ne se situent pas en deçà des objectifs tirés des conclusions des tables rondes. Bien entendu, nous ne voulons pas une suppression systématique des barrages. Toutefois, certains ouvrages sont véritablement problématiques. Il faut à tout prix les faire sauter, sans quoi les milieux concernés risquent de se dégrader encore plus.

M. le président.    La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l'amendement n° 655.


Mme Marie-Christine Blandin.
Il ne suffit pas que les obstacles dont il est question soient mis à l’étude, nous voulons que certains soient supprimés.
Je rappellerai d’abord que le rapport de la Commission mondiale des barrages – il date tout de même de 1997 ! – qui avait été commandé par la Banque mondiale et l’Union internationale pour la conservation de la nature, l’UICN, révèle, d’une part, des impacts sur les rivières et les zones aquifères beaucoup plus négatifs que positifs, d’autre part, des pertes irréversibles d’espèces et d’écosystèmes.Par ailleurs, dans le cadre des réflexions menées par le groupe de travail « biodiversité » du Grenelle de l’environnement, les obstacles aux continuités des fleuves et rivières sont apparus comme des facteurs très graves de disparition des espèces. Comme vient de le rappeler ma collègue Évelyne Didier, le comité opérationnel a fléché les barrages de Poutès-Monistrol, Vézins et la Roche-qui-boit.D’ailleurs, monsieur le ministre, nous avions demandé quelques preuves d’engagement avant l’examen du projet de loi de programme relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement. S’agissant de la mine d’or de Kaw, en Guyane, vous avez pris toutes vos responsabilités. En revanche, le barrage de Poutès-Monistrol, qui était également visé, n’a pas sauté. Le groupe EDF s’est réveillé à temps…

M. Adrien Gouteyron.
D’autres aussi !

Mme Marie-Christine Blandin.
et a demandé à le conserver. Un groupe d’études a donc été mis en place – on sait bien comment les choses se passent ! – et les explosifs ne sont pas arrivés suffisamment tôt pour éviter d’enliser le débat.

Le problème est le suivant : l’Allier est un véritable conservatoire dynamique, sur une distance d’au moins quatre cents kilomètres, et il existe une seule structure d’importance entre sa source et la confluence avec la Loire,…

M. Adrien Gouteyron. C’est faux !

Mme Marie-Christine Blandin.

le barrage de Poutès-Monistrol : 16 mètres de hauteur ; 2,2 millions de mètres cubes d’eau ; une dérivation du cours normal de l’Allier sur dix kilomètres ; un turbinage ; une chute de 61 mètres* ; un édifice datant de 1941 et construit malgré l’avis des pêcheurs et de l’administration des Eaux et Forêts de l’époque.

Depuis cinquante ans, dans le vieil Allier, c’est-à-dire la vraie rivière, il ne coule que 0,5 mètre cube d’eau par seconde. Ce phénomène a été identifié comme étant responsable de la quasi-extinction du saumon de la Loire, lequel a pourtant bien des mérites puisqu’il franchit les bouchons vaseux de l’estuaire avant de sillonner entre les centrales, les radiers de ponts et les quelques barrages.

Tout au long de la Loire, une association accompagnée d’élus a réalisé un travail exemplaire d’effacement. Il ne reste plus que Poutès-Monistrol !

Aux États-Unis, deux cents barrages de ce type ont été supprimés ces dernières années. Si je peux vous fournir ce chiffre et si cette comptabilisation a pu être réalisée, c’est parce que l’on est à mille lieues des petites installations de micro-production d’hydroélectricité, qui ont sans doute motivé les amendements de prudence qui seront présentés ultérieurement.


*Un rapide calcul montre qu'avec un débit moyen du moyen Allier de l'ordre de 10 m3/s et une chute de 61 m c'est une puissance instantanée limitée à 6MkW qui "sort des turbines" , puissance bien faible en regard d'une centrale nucléaire de 1500 Mw.

Il suffit qu'une vingtaine de gros immeuble soient chauffées avec une PAC aquathermique utilisant précisément l'eau de l'allier ou de son sous-sol alluvionnaire pour économiser ces  6MkW et se suppléer ainsi au barrage.


M. le président.
Les amendements nos 187 rectifié bis, 465 rectifié bis et 516 rectifié sont identiques.

L'amendement n° 187 rectifié bis est présenté par M. Mézard, Mmes Laborde et Escoffier et MM. Collin et Barbier.

L'amendement n° 465 rectifié bis est présenté par MM. Courteau, Raoul, Daudigny et Miquel.

L'amendement n° 516 rectifié est présenté par M. Amoudry et les membres du groupe Union centriste.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Dans le premier alinéa de cet article, supprimer les mots :

ou l'effacement

La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 187 bis.


M. Jacques Mézard.
L’article 26 pose le principe de la reconstitution d’une trame bleue, qui vise à assurer la continuité écologique des cours d’eau en prévoyant notamment que « l’effacement des obstacles les plus problématiques pour la migration des poissons sera mis à l’étude ».

Nous considérons que cette disposition vise, en réalité, les grands barrages hydroélectriques et que les difficultés évoquées ne concernent en rien les petites installations hydroélectriques, qui fonctionnent au fil de l’eau, sur des seuils existant parfois depuis plusieurs siècles et en conformité avec la réglementation en vigueur. En l’état, le caractère problématique d’un ouvrage ne repose sur aucun critère scientifique : il demeure totalement subjectif et peut d’ailleurs constituer un non-sens juridique. Cet amendement tend donc à protéger la filière de la petite hydroélectricité et à éviter, à l’avenir, tout contentieux pouvant opposer les entreprises hydroélectriques et certaines associations de protection de la nature, qui seraient tentées de remettre en cause non seulement les projets en cours, mais aussi les installations déjà existantes.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour défendre l'amendement n° 465 rectifié bis.


M. Roland Courteau.

Avec mon collègue Daniel Raoul, notamment, nous allons à contresens, ou plutôt à contre-courant de certains amendements, car nous voulons défendre la petite hydroélectricité. Je crois d’abord devoir préciser que, à la suite de la loi de 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques, l’encadrement de la création et de l’activité des centrales hydroélectriques a été particulièrement renforcé. De plus, les discussions actuelles sur les SDAGE tendent à s’orienter vers un élargissement du classement des cours d’eau, ce qui limitera le développement de la filière hydroélectrique. De nombreuses précautions ont donc déjà été prises. De surcroît, la disposition qui vise à l’effacement des obstacles les plus problématiques aurait sans aucun doute des conséquences sur les installations existantes et sur les projets en cours concernant toute la filière de la petite hydroélectricité. Par ailleurs, les termes « obstacles les plus problématiques », tels que mentionnés dans l’article 26, sont d’une imprécision juridique flagrante et ne reposent sur aucun fondement scientifique. Ces considérations sont donc bien subjectives et ouvrent la porte à toutes les exagérations. Je rappelle également que le fonctionnement d’une installation peut soit être conforme à l’arrêté préfectoral, auquel cas il n’y a aucune raison de remettre en cause l’activité, soit nécessiter des aménagements, et le préfet peut d’ores et déjà prescrire les modifications nécessaires, soit ne pas répondre aux exigences de l’arrêté préfectoral, et le préfet est alors en mesure de suspendre l’activité. Tout est donc prévu, ou presque ! À quoi bon préciser que les obstacles problématiques seront effacés ? Cet ajout n’apporte aucun élément juridique et ne servira qu’à encourager d’innombrables recours et à laisser les activités concernées dans la plus grande incertitude. Nous aurons besoin de toutes les énergies renouvelables pour atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés. Le secteur de la petite hydroélectricité produit une énergie consommée localement et transportée sur de courtes distances, donc sans pertes en ligne. Il représente une production de 1 500 mégawatts et offre des perspectives de développement importantes. Une centrale de 1 000 kilowatts permet d’éviter 3 000 tonnes de dioxyde de carbone et 400 tonnes de cendres, ainsi que l’importation de 350 tonnes de pétrole.Je rappelle enfin que l’activité que nous évoquons est particulièrement encadrée, comme j’ai tenté de le démontrer.

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Amoudry, pour présenter l'amendement n° 516 rectifié.


M. Jean-Paul Amoudry.

L’article 26 pose le principe de la reconstitution d’une trame bleue visant à assurer la continuité écologique des cours d’eau. À cet effet, il prévoit que « l’effacement des obstacles les plus problématiques pour la migration des poissons sera mis à l’étude ».Je vais reprendre très succinctement les argumentaires qui ont été développés, puisque cet amendement est identique aux précédents. Je veux souligner que le caractère problématique d’un ouvrage demeure essentiellement subjectif et introduit un élément d’incertitude juridique évident. En effet, en référence à quel critère le caractère problématique d’un obstacle sera-t-il reconnu ? Qui pourra garantir que la problématique aura le même sens et le même contenu d’une région à l’autre ? Dès lors, la disposition envisagée fait peser un risque important sur toute la filière de la petite hydroélectricité.

M. Roland Courteau. Exactement !

M. Jean-Paul Amoudry.
De surcroît, elle est incompatible, d’une part, avec les objectifs ambitieux qui ont été fixés en matière de production d’énergie renouvelable et, d’autre part, avec l’un des objectifs de la politique de l’eau énoncé à l’article L. 211-1 du code l’environnement : « La valorisation de l’eau comme ressource économique et, en particulier, pour le développement de la production d’électricité d’origine renouvelable ».

M. le président.
L'amendement n° 219, présenté par Mme Didier, MM. Danglot et Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa de cet article, remplacer les mots :

sera mis

par les mots :

et la continuité écologique des masses d'eau seront mis

La parole est à Mme Évelyne Didier.


Mme Évelyne Didier.
Comme nous l’avons déjà indiqué, nous souhaitons que le projet de loi de programme relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement et son article 26 ne se situent pas en deçà des objectifs tirés des conclusions des tables rondes. C’est pourquoi cet amendement prévoit l’effacement des obstacles les plus problématiques.

Je le concède, mes chers collègues, le terme « problématiques » n’est peut-être pas très juridique. Pour autant, je récuse complètement le mot « subjectifs ». Je n’ai pas rêvé : les problèmes sur les barrages existent bel et bien ! Certes, il convient peut-être de trouver des compromis entre divers avantages et divers inconvénients, comme nous avons appris à le faire tout au long du processus du Grenelle de l’environnement, mais en évoquant un critère subjectif, vous allez un peu loin, mes chers collègues ! Je disais donc que cet amendement prévoit l’effacement des obstacles les plus problématiques – nous verrons s’il est nécessaire de fournir une définition plus précise – pour la migration des poissons. (M. Roland Courteau s’exclame.) Les dispositions actuelles n’imposent, en effet, qu’une simple mise à l’étude de ceux-ci, ce qui n’implique aucune contrainte. Or la présence d’ouvrages barrant les cours d’eau altère fortement la continuité écologique des masses d’eau et la migration des poissons, en particulier de l’ensemble des espèces amphihalines. Les obstacles les plus problématiques pour la migration sont généralement des ouvrages de taille importante et ne comprenant pas de systèmes à même de garantir un franchissement suffisant. Ces précisions vous auront peut-être permis de mieux apprécier nos demandes. Un aménagement de tels ouvrages ne ferait que contourner le problème. Il convient donc d’envisager la suppression totale des ouvrages les plus pénalisants qui sont situés sur le territoire français, en s’attachant à prendre en compte les répercussions socioéconomiques et environnementales d’une telle décision.

Bien entendu, il ne s’agit pas de supprimer d’un coup tous les barrages existants ! Néanmoins, il faut tout de même convenir – d’après moi, c’est à la portée de tous – que l’eau n’est pas seulement un véhicule qui transporterait des poissons et qui, à la rigueur, mouillerait des berges. L’eau est un milieu vivant ! À l’heure où l’on parle beaucoup de biodiversité et d’écosystème, il est grand temps de prendre conscience que c’est bien ce qui caractérise nos rivières. (M. Jean Desessard applaudit.)


M. le président.
L'amendement n° 763 rectifié, présenté par MM. Pointereau, Revet, Bizet, Pierre et Bailly et Mme Procaccia, est ainsi libellé :

Compléter le premier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Cette étude, basée sur des données scientifiques sera menée en concertation avec les acteurs concernés.

La parole est à M. Rémy Pointereau.

M. Rémy Pointereau.

Cet amendement vise l’étude qui a été évoquée tout à l’heure et qui concernerait l’aménagement ou l’effacement des obstacles les plus problématiques pour la migration de poissons. Nous souhaitons que cette étude soit menée en concertation avec les acteurs locaux concernés. Il est vrai que les riverains des cours d’eau, qui sont des acteurs de terrain permanents, ont une connaissance incomparable des problèmes rencontrés et de leurs causes, et qu’ils peuvent, grâce à leur expérience, compléter les approches administratives en proposant des solutions pragmatiques. Il s’agit, finalement, d’un amendement de bon sens. Les données scientifiques élaborées dans un bureau, c’est bien, mais la connaissance du terrain, c’est mieux ! On ne doit pas imposer l’élimination des barrages ou des stations hydroélectriques, construits parfois récemment– il y a quinze ans – aux frais soit de personnes privées soit des collectivités locales, sans l’aval des acteurs locaux privés, mais aussi des élus locaux, qui sont présents dans des syndicats de rivières et qui ont réalisé des investissements importants. Je ne me vois pas aujourd’hui supprimer d’un coup de baguette magique, sans concertation, un certain nombre d’obstacles ou de barrages qui ont été construits voilà peu de temps.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Adrien Gouteyron.

Seules quelques dizaines de saumons arrivent au pied du barrage, qui a été équipé d’un ascenseur et d’une goulotte pour la dévalaison. La concession de Poutès aurait dû être renouvelée et, ce qui nous inquiète, c’est qu’elle ne l’a pas été. On attend et on est actuellement dans une situation de non-droit, monsieur le ministre d’État, vous le savez bien. Renouvelez la concession, mais ne le faites pas aveuglément : prévoyez une clause de revoyure qui permette de faire le point et nous saurons alors ce qu’il en est très exactement. Dans cette affaire, mes chers collègues, n’ayons pas d’idées préconçues, ni d’un côté ni de l’autre. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer, pour explication de vote.

M. Jean Boyer.
Je souhaite conserver le ton de la modération, ce qui n’exclut pas la détermination.

Samedi matin, le département de la Haute-Loire, dont Adrien Gouteyron est également l’élu, s’est exprimé dans sa diversité : en trois jours, 200 maires sur 268 ont côtoyé, sur la place Michelet, au Puy-en-Velay, les ouvriers, les employés, les syndicalistes d’EDF, ceux que j’appellerai la France profonde, celle qui ne comprend pas. Une réflexion est indispensable avant toute décision. C’est la démocratie ! Vous l’avez démontré tout à l’heure, monsieur le ministre d’État, avec les qualités d’écoute qui vous caractérisent. Mais, parfois, certaines réalités apportent d’elles-mêmes une réponse de bon sens. Si, par exemple, dans la France profonde, dans une zone où, dans un rayon de trente kilomètres, il y a moins de cinq habitants au kilomètre carré, on s’interroge sur l’existence d’un ouvrage producteur d’énergie, qui prolonge d’ailleurs les souhaits du Grenelle de l'environnement, eh bien ! monsieur le ministre d’État, la France d’en bas ne comprend pas que la France d’en haut envisage des perspectives impensables. Le thème fort de notre département – Adrien Gouteyron, qui a été premier vice-président du conseil général, pourrait le dire mieux que moi – c’est : « conservons et développons nos richesses ». Chaque partie de notre territoire a ses vocations. Les gorges de l’Allier, par exemple, n’ont aucune vocation agricole, ni industrielle, ni artisanale ; l’accès est très difficile. En revanche, depuis des décennies, si on n’y cultive ni le blé, ni la betterave, ni le maraîchage, il est une ressource qui est considérée comme importante compte tenu de la pauvreté du secteur : le barrage de Poutès. Cet ouvrage fait partie d’attentions particulières de la part d’EDF et des collectivités locales, et des investissements ont été réalisés pour celui que l’on appelle le roi de l’Allier, c'est-à-dire le saumon. Monsieur le ministre d’État, les paysans disent souvent : « qui veut noyer son chien l’accuse de la rage ». Le barrage concerné n’a pas la rage, car il est suivi régulièrement, dans tous les domaines. Les obstacles sont situés entre Saint-Nazaire et Nantes, dans l’estuaire de la Loire, à 980 kilomètres de Poutès.

Soyons sérieux, soyons concrets ! En 2008, 39 saumons se sont présentés sur l’échelle à poissons du barrage de Poutès, alors que 421 ont été comptabilisés à Vichy pour la même période. Mes chers collègues, effacer le barrage de Poutès coûterait au minimum 12 millions d'euros, sans apporter aucune amélioration dans les gorges de l’Allier où ce barrage existe depuis 1941. Le complexe hydroélectrique de Monistrol produit en moyenne 80 millions de kilowatts par an*, ce qui correspond à la consommation du quart de la population de la Haute-Loire, soit environ 200 000 habitants. Cela équivaut à 18 millions de tonnes de pétrole chaque année. Si l’on veut diminuer la consommation de pétrole, si on pense qu’il est nocif, nous ne comprenons pas les décisions qui sont prises. Nous souhaitons vivement que ceux qui s’interrogent encore peut-être aujourd'hui entendent le message d’un département français. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)

 

* Espérons qu'il s'agit d'une faute de frappe !

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul.
L’amendement du Gouvernement ne correspond pas exactement à l’idée que je me faisais lorsque Roland Courteau et moi-même avons présenté notre amendement.

Dans le cadre du schéma de cohérence territoriale, nous avons passé, pour l’élaboration du projet d’aménagement et de développement durable, des conventions avec des lycées professionnels pour leur demander de nous aider à remettre en activité des anciens moulins à eau en les équipant d’alternateur en vue de produire de l’électricité, voire de l’énergie mécanique. Indépendamment de l’intérêt que présente l’énergie renouvelable, nous avons engagé une démarche pédagogique envers ces jeunes lycéens. Monsieur le ministre d’État, comment cela se passe-t-il avec les barrages qui servent à alimenter les scieries dans les zones de montagne ? Ce ne sont pas des établissements au sens de l’article L. 214-4 du code de l’environnement, mais ils produisent pourtant de l’énergie renouvelable.

Je comprends que vous visiez les grands barrages hydroélectriques, mais je ne suis pas pleinement satisfait par la rédaction de l’amendement du Gouvernement.

 

Je vous ferai même une contre-proposition : je souhaiterais que vous ajoutiez simplement les termes « sans valorisation énergétique ». Ainsi, on n’entrerait pas dans le débat sur la mini-hydroélectricité et on n’aurait plus besoin de mentionner cet article du code de l’environnement qui ne concerne que les grands établissements.

De fait, la valorisation énergétique peut être de nature électrique ou mécanique. On aurait ainsi la possibilité d’utiliser tous les gisements d’énergies renouvelables qui sont à nos portes, dans nos rivières.

 
M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.

M. François Fortassin. Ce débat montre que la question de l’eau suscite
automatiquement des préoccupations antinomiques …

Mme Évelyne Didier. Mais non !

M. François Fortassin.
entre les pêcheurs, ceux qui défendent les poissons, et les kayakistes, ou les industriels qui se heurtent aux agriculteurs.

Je vous livrerai trois témoignages. Pendant une dizaine d’années, j’ai eu l’honneur de présider la compagnie d’aménagement des coteaux de Gascogne, une société d’aménagement régional. Ma nomination devait être, en quelque sorte, entérinée par la signature d’un certain nombre de ministres. Or il aura fallu neuf signatures pour que je puisse présider aux destinées de cet établissement !

M. Gérard César. C’est que vous le méritiez !


M. François Fortassin.
C’est dire le maquis dans lequel nous sommes !

On parle des saumons. Mais il fut une époque où l’existence de très nombreux moulins dans les vallées pyrénéennes n’empêchait pas les saumons de remonter. Ainsi, dans la vallée de la Barousse, dont je suis originaire, on peut notamment lire dans les cahiers de doléances de 1789 que les ouvriers d’une poterie ont demandé qu’on ne leur serve pas de saumon plus de trois fois par semaine !

M. Bruno Sido, rapporteur. À Strasbourg, c’était la même chose pour les personnels de maison !

M. François Fortassin.
Aujourd'hui, nous n’en sommes plus là…Dans le Gers et les Hautes-Pyrénées, nous sommes fiers que nos ancêtres aient créé, il y a un peu plus d’un siècle, le canal de la Neste, car les rivières du Gers seraient à sec en été, et même en hiver, tels des oueds africains, si elles n’étaient pas réalimentées.

À l’époque, on a fait passer dans ce canal treize mètres cubes d’eau pour n’en laisser que trois dans la Basse Neste. Cela n’a jamais provoqué de drame exceptionnel, ni altéré la vie de la rivière. Avec le principe des débits réservés, imaginez le tollé général que cela susciterait aujourd'hui si nous faisions la même chose !

Monsieur le ministre d’État, j’ai envie de vous souffler une idée, qui ne revêt pas forcément un caractère provocateur : ne serait-il pas temps de créer, dans ce pays, un ministère de l’eau ? (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)


M. Paul Raoult. On a déjà supprimé la Direction de l’eau !

M. François Fortassin. Nous aurions au moins une ligne directrice, qui nous permettrait d’éviter que ces visions antinomiques ne polluent considérablement la discussion.

M. le président. La parole est à M. Daniel Soulage, pour explication de vote.

M. Daniel Soulage.

Je suis né à côté d’une petite rivière et j’ai la chance d’habiter à proximité d’une autre. Ce soir, on parle beaucoup de l’effacement des barrages. Moi aussi, j’ai envie de vous apporter brièvement un témoignage. Voilà une vingtaine d’années, à quelques dizaines de kilomètres de chez moi, on a réaménagé une rivière, redressant les virages, enlevant les arbres et supprimant les barrages existants. Aujourd'hui, il n’y a plus d’eau pour personne ! Comme vient de le dire mon collègue François Fortassin, cette rivière est devenue un oued africain. En revanche, tout a été différent pour la rivière près de laquelle j’habite, car les responsables de l’époque se sont opposés à une telle décision. Non seulement les barrages ont été sauvegardés, mais ils ont été restaurés par ma génération. Les moulins ont été conservés, à la grande joie des poissons (Sourires.), des pêcheurs, des agriculteurs, etc. De plus, les pouvoirs publics locaux ont développé le tourisme en l’axant sur la pêche. Je ne dis pas que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes, mais cela fonctionne. Certes, tous les cas sont particuliers. Mais comme vient de le préciser mon collègue François Fortassin, l’idéal serait – même si je sais que ce n’est pas toujours possible – de réalimenter les petites rivières du sud-ouest de la France en conservant les barrages existants. À propos de l’effacement de certains barrages, je mettrai un bémol : il faut examiner le dossier de manière très fine avant de prendre toute décision, d’autant que se greffe la question de l’énergie. En effet, un certain nombre de moulins ont été remis en valeur pour produire de l’électricité grâce à de petites turbines

M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.

M. Paul Raoult. Ah le Rhône !

M. Didier Guillaume. La sardine du Rhône !

M. Michel Mercier.
Je vois que nos collègues sont essentiellement intéressés par la nourriture ! (Sourires.)

Je comprends bien l’intention du Gouvernement avec cet article 26. Vous nous avez expliqué, monsieur le ministre d’État, que la France comptait 50 000 barrages de toute nature et qu’il fallait, en quelque sorte, rétablir la fluidité des cours d’eau. On peut adhérer à cet objectif, mais la rédaction actuelle du premier paragraphe de l’article 26 pose un certain nombre de problèmes.

L’amendement que vous avez déposé résout peut-être le problème de l’hydroélectricité – je ne connais pas bien le sujet, mais vous avez indiqué que n’était concerné qu’un faible pourcentage des barrages –, mais il ne règle pas les autres problèmes.

Dans le département que j’ai l’honneur de représenter aux confins du Rhône et de la Loire, a été développée, il y a une quarantaine d’années, une économie touristique à partir de plans d’eau qui ont été créés. Je conçois que l’on remette aujourd'hui en cause les actions qui ont consisté à barrer les rivières et à créer des plans d’eau, car elles n’étaient peut-être pas très intelligentes.

M. Jean Desessard. Ce n’est pas la question !

M. Michel Mercier.
Mais si, parce qu’un barrage empêche le passage, et c’est ce qui pose problème ! Si j’ai bien compris, l’article 26 vise à supprimer l’obstacle que constitue le barrage.

Monsieur le ministre d’État, vous prévoyez de réaliser une étude ; on peut être d’accord. Vous envisagez aussi un aménagement des barrages ; on peut encore être d’accord. Mais inscrire dans la loi le terme « effacement » revient à préjuger le résultat de l’étude. C’est aller un peu vite en besogne, d’autant que l’essentiel manque, c'est-à-dire les moyens financiers.Dans le canton que j’administre, un barrage a été construit sur la rivière voilà quarante ans. Ce sont quarante hectares qui se trouvent exploités dans une zone où il n’y avait pas grand-chose. Une économie touristique s’y est développée et on a envie de la conserver. Je comprends bien qu’il faille rétablir la fluidité de la rivière. D’ailleurs, nous avons engagé des études avec tous les acteurs concernés en vue de réaliser un évitement du lac. Coût de l’opération : 13 millions d’euros ! Les collectivités locales sont prêtes à en prendre une partie en charge. Si vous me dites, monsieur le ministre d’État, que l’État participera à hauteur de 4 millions ou 5 millions d’euros, alors vous pouvez inscrire le terme « effacement » dans cet article. En revanche, si l’État n’apporte aucun soutien financier à cette opération, ne mentionnez que la mise à l’étude de l’aménagement, car on devra chercher les financements un peu partout. Rien n’est pire que de préjuger le résultat d’une étude sans avoir les moyens de réaliser les aménagements qui seront décidés ! Pourquoi faire envie en annonçant des décisions que l’on ne pourra pas mettre en œuvre ? Pour ma part, je souhaite vraiment arriver au résultat que vous préconisez. J’accepte la mise à l’étude de l’aménagement des obstacles les plus problématiques pour la migration des poissons, à condition de prévoir un volet financier.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

M. Jacques Mézard. Notre amendement a subi un tir de barrage, si je puis dire (Sourires.)

M. Didier Guillaume. Hydroélectrique ! (Nouveaux sourires.)

M. Jacques Mézard.
Mais il n’y a pas que l’hydroélectricité.

Dans l’article 26, ce sont les termes « effacement », « obstacles » et « problématique » qui posent problème.

Vous nous avez expliqué, monsieur le ministre d’État, que le terme « effacement » ne signifiait pas « destruction ». (M. le ministre d’État fait un signe d’approbation.) Dans ce cas, précisez-le ! Car, dans le langage commun, effacer signifie…

M. François Fortassin. Faire disparaître !

M. Jacques Mézard.
Tout à fait !  Voilà deux ans, la communauté d’agglomération que je préside a financé la restauration de nombreux seuils de rivière, pour plusieurs centaines de milliers d’euros, avec la participation financière de l’agence de l’eau Adour-Garonne.Les seuils de rivière sont des obstacles que l’on nous encourage toujours à restaurer. Il faut donc lever toute ambiguïté en la matière. Un sénateur socialiste. On n’a pas parlé du Rhin !

M. Jacques Mézard.
On peut également prendre cet exemple ! Quoi qu’il en soit, les seuils de rivière sont encore à l’ordre du jour et on nous encourage à poursuivre cette politique de restauration. Or l’article 26 ne me paraît pas tout à fait cohérent par rapport à cette analyse. Enfin, le mot « problématique », s’il ne constitue pas forcément un non-sens juridique, pose de sérieuses difficultés. Nous maintenons donc notre amendement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Mme Marie-Christine Blandin.
Nous avons tous envie d’aller nous coucher. J’ai une solution qui devrait ravir tout le monde : je propose de rectifier les amendements identiques nos 187 rectifié bis, 465 rectifié bis et 516 rectifié en ajoutant les mots « ou le maintien ». Cette phrase du premier alinéa de l’article 26 serait donc ainsi rédigée : « en particulier, l’aménagement, ou le maintien, ou l’effacement des obstacles les plus problématiques pour la migration des poissons sera mis à l’étude ».

M. Gouteyron disait qu’il n’aimait pas les études, car elles préconisent des solutions pré-réfléchies. Avec cette rédaction, chacun y trouve son compte ! (M. Adrien Gouteyron s’exclame.)

M. le président. Messieurs Mézard, Courteau et Amoudry, acceptez-vous cette proposition de rectification ?.

M. Didier Guillaume. Il n’y a guère d’enthousiasme !

M. le président.
Je constate que cette suggestion n’a aucun écho.

La parole est à M. Philippe Richert, pour explication de vote.


M. Philippe Richert.

Si nous voulons aller dans le détail de tout ce qu’il faut faire en vue d’apporter des réponses aux enjeux majeurs en matière de continuité écologique, nous allons y passer la nuit, voire davantage. Certes, il s’agit de sujets importants, mais nous discutons d’un projet de loi de programme, qui doit simplement indiquer la direction à prendre et prévoir des solutions générales, qui seront ensuite déclinées. Si nous commençons à chercher des applications concrètes pour chaque cas, nous n’avons pas fini ! Les barrages sur le Rhin ont constitué des obstacles très importants pour la migration des saumons et des lamproies marines, entre autres. La solution trouvée, à savoir la construction d’escaliers permettant de passer à côté des barrages, a été positive, car elle a évité leur destruction. Il s’agit non pas de supprimer les barrages, mais de trouver, pour chaque situation, la solution adéquate. La terminologie retenue permet, me semble-t-il, une approche dossier par dossier en vue d’apporter des réponses concrètes. La question de la continuité écologique est très importante, car celle-ci favorise la prise en compte de la migration des espèces et la reconquête de la qualité des milieux. Pour ce qui est du Rhin, cet indicateur a été particulièrement apprécié.

La formulation du Gouvernement me convient, sachant que la discussion du projet de loi Grenelle II nous permettra de compléter et de préciser les mesures concrètes que nous devrons mettre en œuvre.Je suivrai donc les avis de la commission et du Gouvernement.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 187 rectifié bis, 465 rectifié bis et 516 rectifié.  (Les amendements sont adoptés.)

M. le président. Madame Didier, l’amendement n° 219 est-il maintenu ?

Mme Évelyne Didier.
En vous soumettant cet amendement, je cherchais simplement une solution d’apaisement. Même si la formulation proposée me convient moins, j’accepte de le retirer.

M. le président. L’amendement n° 219 est retiré.

Monsieur le ministre, l’amendement n° 817 est-il maintenu ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre d’État. Puisque cet amendement ne semble pas satisfaire le Sénat, je n’ai pas de raison de le maintenir.

Je rappelle encore une fois à MM. Boyer et Gouteyron que le sort du barrage qu’ils ont évoqué, avec émotion, n’est aucunement en jeu avec ce texte ! Cela doit être bien clair : la décision ne sera prise, comme le prévoit l’amendement de M. Pointereau, que sur la base de données scientifiques et en concertation avec les acteurs locaux.  Vous avez dit, monsieur Gouteyron, que vous refusiez tout a priori. C’est le cas : la décision ne sera précédée d’aucun préalable !

Cela étant, je peine à concevoir qu’une argumentation de principe sur une étude concernant les obstacles, destinée à en tirer les conséquences éventuelles, soit à ce point problématique. Je retire cet amendement, car il n’apporte rien. Il suffit de suivre la philosophie générale du texte et de mener les études nécessaires, y compris celles qui portent sur les données financières, avec les acteurs locaux concernés. Je rappelle que la loi de finances a prévu 15 millions d’euros au titre de la mise à disposition des acteurs. Il s’agit bien, en effet, de propriétés tierces par rapport à l’État.

En outre, nous aurions probablement dû faire l’économie des termes « aménagement » et « effacement », et en rester au mot « obstacle ».

Pour l’instant, j’y insiste, il s’agit simplement d’une mise à l’étude et, si l’amendement présenté par M. Pointereau est adopté, cette étude sera menée en concertation avec les acteurs concernés. J’avais déposé cet amendement pour détendre l’atmosphère, mais il ne présente plus d’intérêt.


M. le président. L’amendement n° 817 est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 763 rectifié.(L’amendement est adopté.)

M. le président. Je constate que l’amendement a été adopté à l’unanimité des présents.

L’amendement n° 466, présenté par MM. Andreoni, Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mme Bourzai, M. Guillaume, Mme Blandin, MM. Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du second alinéa de cet article, après le mot :

recherché

insérer les mots :

sur des unités hydrogéographiques cohérentes

La parole est à M. Roland Courteau.


M. Roland Courteau.
Mes collègues Jacques Mézard, Jean-Paul Amoudry et Daniel Raoul et moi-même étant responsables de la longueur de ce débat, au demeurant fort intéressant, nous allons nous montrer raisonnables.

Je vous prie donc de considérer, monsieur le président, que cet amendement, ainsi que les amendements nos 467, 468 et 452, ont été défendus.

M. le président.
L’amendement n° 467, présenté par MM. Andreoni, Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mme Bourzai, M. Guillaume, Mme Blandin, MM. Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans la seconde phrase du second alinéa de cet article, après les mots :

établissements publics territoriaux de bassin

insérer les mots :

lorsque le périmètre le justifiera

Cet amendement a été défendu.

L’amendement n° 468, présenté par MM. Andreoni, Raoul et Courteau, Mme Herviaux, MM. Raoult, Repentin, Ries et Teston, Mme Bourzai, M. Guillaume, Mme Blandin, MM. Antoinette, Gillot, S. Larcher, Lise, Patient, Tuheiava et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans la seconde phrase du second alinéa de cet article, après les mots :

établissements publics territoriaux de bassin

insérer les mots :

ou bien une structure de coopération intercommunale

Cet amendement a été défendu.

L’amendement n° 452, présenté par MM. S. Larcher, Lise, Gillot, Patient, Antoinette et Tuheiava, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans la seconde phrase du second alinéa de cet article, après le mot : eau

insérer les mots :

et des offices de l'eau

Cet amendement a été défendu.

Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

 

M. Bruno Sido, rapporteur.
Je serai aussi bref que M. Courteau. La commission demande aux auteurs des amendements nos 466, 467 et 468 de bien vouloir les retirer. À défaut, elle émettra un avis défavorable. Elle est en revanche favorable à l’amendement n° 452.

M. le président.
Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Chantal Jouanno, secrétaire d’État.    Le Gouvernement partage l’avis de la commission sur les quatre amendements.

M. le président. Monsieur Courteau, les amendements nos 466, 467 et 468 sont-ils maintenus ?

M. Roland Courteau. Non, je les retire, monsieur le président.

M. le président. Les amendements nos 466, 467 et 468 sont retirés.    Je mets aux voix l’amendement n° 452.   (L’amendement est adopté.)

M. le président.
Je constate que l’amendement est adopté à l’unanimité des présents.

Je mets aux voix l’article 26, modifié.

(L’article 26 est adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

 

 Description : poutes
Le barrage de Poutès sur l'Allier dont il a été question ici et les décisions après le débat.

 

Le code de l'environnement

 

Article L214-4

 

I. - L'autorisation est accordée après enquête publique et, le cas échéant, pour une durée déterminée. Un décret détermine les conditions dans lesquelles le renouvellement des autorisations et l'autorisation de travaux, installations ou activités présentant un caractère temporaire et sans effet important et durable sur le milieu naturel peuvent être accordés sans enquête publique préalable.

II. - L'autorisation peut être retirée ou modifiée, sans indemnité de la part de l'Etat exerçant ses pouvoirs de police, dans les cas suivants :

1° Dans l'intérêt de la salubrité publique, et notamment lorsque ce retrait ou cette modification est nécessaire à l'alimentation en eau potable des populations ;

2° Pour prévenir ou faire cesser les inondations ou en cas de menace pour la sécurité publique ;

3° En cas de menace majeure pour le milieu aquatique, et notamment lorsque les milieux aquatiques sont soumis à des conditions hydrauliques critiques non compatibles avec leur préservation ;

4° Lorsque les ouvrages ou installations sont abandonnés ou ne font plus l'objet d'un entretien régulier.

II bis. - A compter du 1er janvier 2014, en application des objectifs et des orientations du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux, sur les cours d'eau, parties de cours d'eau ou canaux classés au titre du I de l'article L. 214-17, l'autorisation peut être modifiée, sans indemnité de la part de l'Etat exerçant ses pouvoirs de police, dès lors que le fonctionnement des ouvrages ou des installations ne permet pas la préservation des espèces migratrices vivant alternativement en eau douce et en eau salée.

III. - Tout refus, retrait ou modification d'autorisation doit être motivé auprès du demandeur.

IV. - Un décret détermine les conditions dans lesquelles les autorisations de travaux ou d'activités présentant un caractère temporaire, périodique et dépourvu d'effet important et durable sur le milieu naturel seront accordées, sans enquête publique préalable, aux entreprises hydroélectriques autorisées qui en feront la demande pour la durée du titre à couvrir. Les dispositions des décrets en vigueur à la date de la publication de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique seront abrogées si elles ne sont pas en conformité avec les dispositions du décret visé ci-dessus.

 

 

Article L. 214-17 -
Classement des cours d'eau

L'article L. 214-17 a pour objet de redéfinir les critères de classement des cours d'eau au titre de la protection de l'eau et des milieux aquatiques.

D'une part, les cours d'eau, parties de cours d'eau ou canaux qui sont en très bon état écologique ou dans lesquelles une protection complète des espèces amphihalines est nécessaire ne pourront recevoir un nouvel ouvrage hydraulique constituant un obstacle à la continuité écologique. Cet article précise que la continuité écologique se caractérise par un transport suffisant des sédiments et par la circulation des espèces vivantes. En outre, sur ces cours d'eau réservés, le renouvellement du titre des ouvrages existants serait subordonné à des prescriptions permettant d'assurer le très bon état écologique des eaux ou la protection des poissons amphihalins.

D'autre part, les ouvrages situés sur les cours d'eau sur lesquels il est nécessaire d'assurer un transport suffisant des sédiments et la circulation des poissons migrateurs devront être gérés, entretenus et, le cas échéant, équipés selon des règles définies avec l'autorité administrative. Dans la pratique, cela signifie que les ouvrages hydrauliques situés sur ces cours d'eau devront comporter des dispositifs d'ouverture (des vannes de fond par exemple) afin de laisser passer les sédiments à des intervalles réguliers.

Par ailleurs, la procédure de classement des cours d'eau est déconcentrée. Les deux catégories de cours d'eau seront énumérées sur des listes établies pour chaque bassin ou sous-bassin par le préfet coordonnateur de bassin après avis des conseils généraux intéressés et du comité de bassin. Les obligations résultant de ces nouveaux critères entreront en vigueur à compter de la publication des listes pour les nouveaux ouvrages et dans un délai de cinq ans à compter de la publication des listes pour les ouvrages existants situés sur les cours d'eau « passes à poissons ». Une fois entrés en vigueur, ces classements se substitueront à ceux qui découlent de l'article 2 de la loi du 16 octobre 1919 et de l'article L. 432-6 du code de l'environnement. Les préjudices liés à cette réforme ne pourront donner lieu à indemnisation que dans la mesure où les nouvelles obligations feraient peser sur l'exploitant de l'ouvrage une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général qu'elles poursuivent.

Votre rapporteur note que ces nouvelles dispositions permettront de rationaliser les classements existants en les faisant établir à une échelle plus pertinente, celle de l'unité hydrographique. Elles autoriseront ainsi le déclassement de cours d'eau pour lesquels l'application de ces critères ne présentait que peu d'intérêt et renforceront la protection des cours d'eau en bon état écologique.

 

L'Article 26

La trame bleue permettra de préserver et de reconstituer les continuités écologiques des milieux nécessaires à la réalisation de l'objectif d'atteindre ou de conserver d'ici à 2015 le bon état écologique ou le bon potentiel pour les masses d'eau superficielles ; en particulier, l'aménagement ou l'effacement des obstacles les plus problématiques pour la migration des poissons sera mis à l'étude.Le développement des maîtrises d'ouvrages locales sera recherché, notamment en y associant les collectivités territoriales, afin de restaurer et entretenir les zones humides et les réservoirs biologiques essentiels pour la biodiversité et le bon état écologique des masses d'eau superficielles. En particulier, la création des établissements publics territoriaux de bassin sera encouragée, ainsi que l'investissement des agences de l'eau dans ces actions.


Réformes et décentralisation

Dans le jargon de la fonction publique, on appelle cela « l'administration territoriale de l'état ». Il s'agit des centaines de milliers d'agents assurant la présence des ministères dans les départements et les régions et répartis dans une trentaine de services. Le 10 janvier 2010, ces services seront fondus dans deux ou trois grandes directions. Une « direction de la cohésion sociale » réunira les fonctionnaires en charge de la jeunesse et des sports, des droit des femmes, de l'hébergement d'urgence, du logement ...Le lien hiérarchique entre l'agent et son ministère d'origine sera rompu. Toutes ces directions seront soumises à l'autorité du préfet qui dépendra lui-même du préfet de sa région avec quelques exceptions.  Des « préfigurateurs » seront nommés qui auront charge de trouver à chaque fonctionnaire un poste dans le nouvel organigramme. Un député a interrogé le secrétaire d'état chargé des sports sur l'avenir des Directions Départementales Jeunesse et Sports et des Centres Régionaux d'Education Physique et Sportive. Monsieur Bernard LAPORTE rappelle que le schéma de base de l'organisation de l'état dans les départements reposera sur deux structures: - La direction départementale des territoires

                - La direction départementale de la population et de la cohésion sociale

Ces explications sont complétées par des notions telles que l'importance démographique, les nécessités en matière de cohésion sociale, la politique de la ville, l'indispensable concertation avec le tissu local, etc ...

C'est donc au sein de cette novatrice direction départementale des services que devraient « échouer « les D.D.J.S. Le sort des établissements régionaux semble loin d'être fixé. Cette démonstration un tantinet alambiquée est éclaircie par cette conclusion:

« La réforme doit permettre de développer des modes d'intervention nouveaux, centrés sur l'ingénierie sociale »

 

Un défi à relever pour les dirigeants sportifs qui devront comprendre et appréhender le fonctionnement de ces nouvelles structures.

                               J.C. LE BIHAN                            source : scoop 94R